0,99 €
Extrait : " MADAME DÉSARNAUX, à Jean : Ah ! vous voilà...Le docteur était-il chez lui ? JEAN : Oui, madame, il rentrait à l'instant même. MADAME DÉSARNAUX : Et vous l'avez prié de venir tout de suite ? JEAN : Il m'a dit qu'il serait ici dans un quart d'heure... le temps d'expédier un rhumatisme et deux bronchites..."À PROPOS DES ÉDITIONS LIGARANLes éditions LIGARAN proposent des versions numériques de qualité de grands livres de la littérature classique mais également des livres rares en partenariat avec la BNF. Beaucoup de soins sont apportés à ces versions ebook pour éviter les fautes que l'on trouve trop souvent dans des versions numériques de ces textes. LIGARAN propose des grands classiques dans les domaines suivants : • Livres rares• Livres libertins• Livres d'Histoire• Poésies• Première guerre mondiale• Jeunesse• Policier
Das E-Book können Sie in Legimi-Apps oder einer beliebigen App lesen, die das folgende Format unterstützen:
Seitenzahl: 46
EAN : 9782335055306
©Ligaran 2015
COMÉDIE EN UN ACTE
Représentée pour la première fois, à Paris, sur le théâtre du GYMNASE, le 15 mai 1862.
Un salon. Portes latérales et porte au fond ; à gauche, cheminée, glace et canapé ; à droite, table et deux portes.
BADINIER.
MAURICE.
LE DOCTEUR VOUZON.
JEAN, domestique.
MADAME DÉSARNAUX.
CLÉMENCE BADINIER.
CÉLINE.
La scène se passe de nos jours, à Paris.
Madame Désarnaux, Céline, Jean.
Au lever du rideau, Céline est assise à droite et travaille ; madame Désarnaux entre par la droite pendant que Jean entre par le fond.
Ah ! vous voilà… Le docteur était-il chez lui ?
Oui, madame, il rentrait à l’instant même.
Et vous l’avez prié de venir tout de suite ?
Il m’a dit qu’il serait ici dans un quart d’heure… le temps d’expédier un rhumatisme et deux bronchites…
Très bien…
Pardon, madame… mais qui donc est malade ?
Comment pouvez-vous le demander ?… mon fils… mon pauvre Maurice…
Bah !… Qu’est-ce qu’il a ?
Je n’en sais rien… Depuis quelque temps, il change, il maigrit, il m’inquiète.
Oh ! moi aussi… mon pauvre cousin !
Oui, je sais combien tu l’aimes… Un si brave garçon… un cœur d’or !
Et bon… affectueux… S’il allait faire une maladie grave.
Oh ! je passerais toutes les nuits à son chevet !
Et moi… je ne vous quitterais pas.
Chère enfant ! je reconnais là ton dévouement pour ta tante…
On sonne.
On sonne… C’est sans doute le docteur.
C’est bien… prévenez mon fils… Toi, Céline, laisse nous, je te rendrai compte de la consultation.
Oh ! oui… car, jusque-là, je serai bien inquiète.
Elle entre à gauche. – Jean est entré à droite.
Madame Désarnaux, le docteur Vouzon.
Mon pauvre enfant ! (Au docteur Vouzon qui entre par le fond.) Enfin vous voilà, docteur…
J’accours… On est donc malade ici… sans ma permission ?… Ce n’est pas vous, je suppose ?…
Non, il s’agit de mon fils…
De Maurice ?
Oui… depuis un mois, il est triste, rêveur, distrait…
Ah !… ah !…
C’est grave, n’est-ce pas ?
Nous verrons tout à l’heure.
Il ne mange plus… il a de l’oppression… il pousse de gros soupirs…
Ah !… ah !…
Quoi ?
Continuez…
Il passe une partie de la nuit à se promener dans sa chambre, à écrire… à parler tout haut ; son œil est vif, animé… comme s’il avait la fièvre… Je crois que c’est de l’inflammation…
Moi aussi… Quel âge a Maurice ?
Dix-neuf ans…
Très bien !… ça me suffit… je n’ai pas besoin de le voir.
Comment ?
Tranquillisez-vous, cela ne sera rien.
Mais quelle est sa maladie ?
Vous tenez à le savoir ?
Sans doute…
Eh bien, entre nous, je crois que le cœur est pris…
Ah ! mon Dieu ! un anévrisme !
Mais non !… Il est amoureux…
Mon fils ?… c’est impossible ! ce n’est pas vrai !
Voyons, calmez-vous, ma bonne madame Désarnaux…
Vous calomniez mon enfant, et vous voulez que je me calme ?
Mon Dieu, je ne le calomnie pas ! Ceci est un chapitre d’histoire naturelle assez difficile à expliquer… Cependant je vais essayer… Voyez-vous, dans la vie des garçons il y a trois phases… la première commence au bébé… à ce délicieux petit fardeau qui se laisse porter, retourner, empaqueter avec la docilité d’un colis…
Quel âge charmant !
Je crois bien ! c’est votre lune de miel, à vous autres mères… Aussi vous la prolongez… jusqu’à la courbature !… Malheureusement le bébé devient lourd… il faut le poser à terre… hélas !… il est déjà moins à vous ; ses petites jambes rêvent l’indépendance et font courir après lui… l’enfant a disparu pour faire place au gamin… à cet infernal trésor qui tyrannise… tout en le bourrant de sucre… le vieux chien de la maison ; qui brise les porcelaines, grimpe sur les meubles, touche au feu, tombe dans les bassins…
Ne m’en parlez pas !
À ce vaurien charmant que l’on enferme dans sa chambre et que, cinq minutes après, l’on retrouve en haut d’un cerisier…
Mais c’est arrivé à Maurice… même que son pantalon…
Cet âge est la mort aux pantalons… mais le vaurien se fait tout pardonner d’un mot : « Maman !… » Car il dit encore : « Maman !… » Bientôt le collégien se transforme, il devient rêveur, il prend soin de ses habits, cultive sa chevelure… et il dit : « Ma mère… » devant le monde.
Ah !
Ah ! c’est la lune rousse qui commence… c’est le jeune homme qui paraît… Il est distrait… il soupire ; il se demande avec inquiétude pourquoi les tourterelles roucoulent…
Mon fils ne m’a jamais adressé de pareilles questions, je vous prie de le croire !
Quelquefois il fait des vers… de mauvais vers !
Pas Maurice !
Cela viendra… enfin il est triste, sombre, inquiet… c’est ce qu’une chanson célèbre appelle le Premier pas… et ce que nous autres médecins nous nommons : la crise.
La crise ?
Un homme me comprendrait tout de suite.
Je vous comprends parfaitement… mais vous vous trompez… mon fils est honnête !