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Extrait : "HENRIETTE : ET voilà qu'avec tes confidences tu m'empêches de terminer mon sachet. LÉONCE : Le grand malheur ! HENRIETTE : Laure ne sera pas contente. LÉONCE : C'est donc à elle que vous le destinez ? HENRIETTE : C'est mon lot... pour la loterie de bienfaisance dont elle s'occupe... Elle doit venir le chercher aujourd'hui..."À PROPOS DES ÉDITIONS LIGARANLes éditions LIGARAN proposent des versions numériques de qualité de grands livres de la littérature classique mais également des livres rares en partenariat avec la BNF. Beaucoup de soins sont apportés à ces versions ebook pour éviter les fautes que l'on trouve trop souvent dans des versions numériques de ces textes. LIGARAN propose des grands classiques dans les domaines suivants : • Livres rares• Livres libertins• Livres d'Histoire• Poésies• Première guerre mondiale• Jeunesse• Policier
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EAN : 9782335055085
©Ligaran 2015
Un salon élégamment meublé. Porte au fond et portes latérales. – Au milieu du théâtre, une table servie. – À gauche, un guéridon. – À droite, un divan.
BLANDINET.
FRANÇOIS, son frère.
TIBURCE, son fils.
LÉONCE, fils de Blandinet.
AUBERTIN, ami de Blandinet, négociant.
MIZABRAN, bottier.
JOSEPH, domestique.
UN DEUXIÈME BOTTIER.
HENRIETTE, femme de Blandinet.
LAURE, fille d’Aubertin.
PRUDENCE, femme de chambre.
Les trois actes sont à Paris de nos jours.
Henriette, Léonce, puis Prudence et Joseph.
Henriette est sur le divan, brodant un sachet à serrer les mouchoirs Léonce est assis sur un pouf auprès d’elle.
Et voilà qu’avec tes confidences tu m’empêches de terminer mon sachet.
Le grand malheur !
Laure ne sera pas contente.
C’est donc à elle que vous le destinez ?
C’est mon lot… pour la loterie de bienfaisance dont elle s’occupe… Elle doit venir le chercher aujourd’hui…
Ah ! nous verrons aujourd’hui mademoiselle Aubertin ?
Oui, monsieur, nous la verrons.
Et vous me promettez de lui parler ?…
Je te le promets… De ton côté, cause avec son père… et, si tout marche, comme je le crois, avant quinze jours M. et madame Blandinet auront l’honneur de faire part à leurs amis et connaissances du mariage de M. Léonce Blandinet, leur fils et beau-fils, avec mademoiselle Laure Aubertin.
Que vous êtes bonne !
Dame ! une belle-mère… doit être deux fois bonne… pour lutter contre le préjugé.
En se remariant, il me semble que mon père m’a donné une sœur…
Joseph entre, pose un ravier sur la table servie et prend la chaise placée à gauche pour la mettre près de la table.
Ce qui n’empêche pas, monsieur, que vous devez craindre et m’obéir !
Qui maman…
Madame… le déjeuner est servi…
Joseph, prévenez mon père.
Monsieur est dans son cabinet… en train de faire un coup… de tête.
Un coup de tête ! Comment ?
Joseph entre à gauche.
Il écrit à ses locataires… il leur annonce qu’il les augmente !
Mon père… augmenter ses locataires ?… (Riant.) Allons donc, c’est impossible… lui qui, depuis vingt ans, n’a jamais pu s’y résoudre…
Je l’ai décidé ce matin… oh ! j’ai eu de la peine ! « Ce ne sont plus des locataires, me disait-il, ce sont des amis… C’est vingt ans d’amitié que je vais perdre… »
Pauvre père !… je reconnais bien son excellent cœur…
Le voilà !
Henriette se lève, ainsi que Léonce, qui traverse ta scène pour descendre à gauche
Henriette, Léonce, Blandinet, puis Joseph.
Eh bien, est-ce fait ?
Est-ce fait ? est-ce fait ? si tu crois que cela va comme ça !… (Dépliant son papier.) J’ai rédigé un petit brouillon…
Oh ! que de ratures !
Oui… J’ai cherché à adoucir. (Lisant.) « Monsieur… » (S’arrêtant.) « Monsieur… » à des gens dont on reçoit l’argent depuis vingt ans !
Mets : « Cher monsieur… »
Ah ! oui… (Prenant un crayon.) Je vais l’écrire tout de suite, parce que je l’oublierais. (Écrivant.) « Cher monsieur… » (Lisant.) « Cher monsieur… croyez bien que c’est le cœur navré que je prends la plume pour vous écrire… »
Très bien !
Ce n’est pas un peu sec ?
Mais non !
« Mais des raisons, dont vous apprécierez la valeur quand je vous les aurai fait connaître, m’obligent à prendre une grave détermination… »
Parfait !
Après ?
Voilà !… j’en suis resté là…
Comment ?
Dame ! je leur annonce des raisons et je n’en ai pas à leur donner… Ah ! si l’en avais ! mais je n’en ai pas !… ma maison est ce qu’elle était quand je la leur ai louée… je ne l’ai pas agrandie… je ne l’ai pas embellie… au contraire… les plafonds sont noirs, les serrures crient… mais ce serait à eux à me demander de la diminution ! Il faut être logique !
Sans doute, mon ami… mais puisque tout augmente.
Non ! c’est cruel, c’est odieux, c’est méchant, ce que vous voulez me faire faire là !
Mon père !
Voyons… voyons… ne parlons plus de cela… et viens te mettre à table…
Non… je n’ai pas faim… Quand on a une pareille lettre à écrire…
Eh bien, tu l’écriras plus tard, pour le terme prochain.
C’est cela… ça me donnera le temps de chercher des raisons… de bonnes… s’il y en a ! (Ils s’asseyent à table.) Ah ! ça va mieux ! (À Léonce.) Passe-moi des radis… À propos, tu sais que mon frère François arrive aujourd’hui d’Elbeuf ?
J’ai fait préparer sa chambre.
Je suis bien sûr que mon oncle augmente ses locataires, lui.
S’il a des raisons, il fait bien… Quand j’ai, des raisons, je suis très ferme… je suis même un peu Turc…
Toi !
Ce pauvre père !
Témoin Williams, notre ancien cocher…
Il se grisait tous les jours.
Il nous versait trois fois par semaine.
Aussi je l’ai mis à la porte assez vertement !
C’est-à-dire que c’est moi qui l’y ai mis…
C’est toi… oui ! mais je t’ai dit : « Je ne veux plus le voir !… Qu’il parte !… » et tu t’es chargée de la question de détail…
Et vous, vous lui avez fait remettre cent francs par Joseph, au moment de partir.
Joseph est un bavard !… (À Léonce.) Donne-moi à boire.
Dites donc, mon père, hier à la Bourse, il courait de mauvais bruits sur votre banquier, M. Turneps… On le dit malade…
Ah ! le pauvre homme !… j’irai lui porter ma carte.
Non !… malade… dans ses affaires !
Vraiment ?… Ah ! ça me fait beaucoup de peine…
D’autant plus que vous avez chez lui trois cent mille francs en compte courant.
C’est vrai !
Et si vous vouliez m’autoriser à les retirer ?…
Oh !… comme ça, tout de suite ?… ça pourrait le blesser
Cependant…
Il faudrait lui reprendre ça tout doucement… sans avoir l’air… par cinq cents francs…
Ça n’en finira pas !…
À propos, on m’a dit que M. Mizabran, mon bottier, était venu ce matin…
Oui, il doit repasser… Encore un de tes locataires… qui te paye en phrases !
Joseph entre avec un plateau sur lequel se trouvent le café et les tasses.
C’est un père de famille… et, après tout, il ne me doit que six termes t…
Joseph retire les assiettes et place devant chaque personne les tasses à café, puis le sucrier.
Six termes !
Oui…, mais il me donne des à-comptes… La semaine dernière, il m’a encore apporté trois paires de bottes.
Que tu ne lui avais pas commandées…
C’est vrai !… il a eu la délicatesse de me les faire de lui-même.
Joseph sort.
Ce qui fait qu’en ce moment, tu as soixante paires de bottes neuves dans ton armoire…
Que veux-tu ! je n’use pas… et puis c’est votre faute… si vous vous faisiez chausser par lui, il s’acquitterait plus vite… Il ne demande qu’à travailler, cet homme !
Merci… il vous moule un pied d’éléphant !
Joseph rentre tenant un carafon d’eau-de-vie qu’il place sur la table.
Oui, mais c’est solide… et ça ne blesse pas.
Monsieur…
Quoi ?
Il y a là M. Mizabran… Il dit qu’il vient pour son terme…
Tiens !
La !… vous voyez, il m’apporte de l’argent… (À Joseph.) Faites-le entrer… (À Henriette et à Léonce.) Il ne faut pas comme ça se presser de juger les gens…
Mizabran paraît. Joseph sort, emportant le plateau et les assiettes
Blandinet, Henriette, Léonce, Mizabran.
Entrez donc, monsieur Mizabran… entrez !
Oh ! pardon… je dérange monsieur et madame, je reviendrai…
Non ! restez ! je prends mon café et je suis à vous… Tenez, asseyez-vous.
Oh ! je ne suis pas fatigué…
Eh bien, quoi de nouveau ? Vos affaires reprennent-elles un peu ?
Oh ! oh ! mes affaires…
Il se met à genoux à côté de Blandinet et lui prend mesure.
Je me suis pourtant laissé dire… (L’apercevant.) Eh bien, que faites-vous donc ?
J’ai pensé qu’à l’occasion du terme…
Il se relève
Toujours la même chanson !
Soixante et unième couplet !
Je vais lui parler… ça devient un abus ! (Haut, se levant.) Monsieur Mizabran, j’espère que vous ne prendrez pas en mauvaise part ce que je vais vous dire… mais je vous avoue… qu’aujourd’hui… (Regardant Henriette et élevant la voix.) j’espérais un peu d’argent…
Croyez que…
Pas tout !… mais un peu…
Ce n’est pas ma faute, monsieur Blandinet… et certainement, si je le pouvais… car, je le disais encore ce matin à ma femme : « Il n’y a pas de plus grand bonheur que de payer son terme ! »
Très bien… ces sentiments vous honorent…
Mais la chaussure ne va pas… c’est la guerre d’Amérique qui en est cause… Je n’y peux rien, moi !